Seleção : Une remise en question nécessaire pour éviter une catastrophe historique

Après un nouvel échec qui a conduit à une très décevante seconde place de son groupe, Fernando Santos se doit de s’imposer une remise en question globale.

On ne va pas se mentir, ces deux derniers matchs de la Seleção ont été cataclysmiques. Un match nul 0-0 face à l’Irlande, une défaite 2-1 à domicile face à la Serbie, et voilà le Portugal de nouveau en barrages pour la Coupe du Monde. Un échec total qui met en avant un constat implacable, le vainqueur de l’Euro 2016 est loin, très loin d’être au niveau auquel on l’attendait. Mais quelles sont les raisons de cet échec ?

Des choix discutables 

Au-delà de ce que l’on a pu observer ce dimanche, les erreurs se répètent mais surtout, se ressemblent. D’abord avant le match, au moment de découvrir la composition d’équipe, le système reste inchangé depuis bien longtemps. Le 4-3-3 avec un numéro 6 et deux milieux plus avancés est reconduit.

Si sur le papier cela ne semble pas incohérent, dans le jeu, c’est une toute autre histoire. Empiler des individualités ne semble pas suffisant, surtout face à de bons ou très bons adversaires. Cependant, utiliser chaque joueur de sortes à ce qu’ils puissent répondre au besoin collectif, tout en ayant la possibilité de mettre à bien leurs qualités individuelles semblerait idéal. Or, la Seleçao ne met pas ceci en avant. Pire, il ne semble n’y avoir jamais eu de remises en question du système tactique ou d’une quelconque identité de jeu. Résultats, des éliminations précoces lors de la Coupe du Monde 2018 et de l’Euro 2020.

Des signaux d’alertes étaient pourtant déjà présents lors de cette dernière compétition : une défense qui s’est montrée fébrile dans son dos, un jeu stéréotypé basé principalement sur des centres, des corners joués à deux. Sans oublier des changements tardifs en cours de match ou bien des choix davantage défensifs plutôt qu’offensifs. On retrouve cela même dans la liste des joueurs convoqués en sélection, en témoigne la présence de quatre numéro 6 pour ce dernier rassemblement. Bref, une véritable désillusion qui peut également s’expliquer par les déclarations d’après-match qui ne semblent pas cohérentes avec ce que représente le Portugal. Notamment, lorsque le 0-0 face à l’Irlande a été jugé comme un “résultat satisfaisant” par le sélectionneur.

Un effectif pourtant riche en qualité

Si l’on se montre si exigeant avec le Portugal, c’est d’abord car il possède l’une des plus belles générations de son Histoire. Un mélange d’expérience, de jeunesse et d’athlètes au sommet de leurs carrières. Des joueurs cadres au sein de leur effectif, habitués à jouer les grands rôles dans les grandes compétitions, avec un véritable leader dans ses rangs, en la personne de Cristiano Ronaldo. De quoi faire rêver tout un pays, en quête de retrouver la saveur d’un trophée international. 

Du renouveau, une prise de conscience, mais comment faire en sorte que tout ceci puisse prendre forme ?

Trouver les bons ingrédients 

Les barrages sont maintenant la première étape à franchir. Et il faudra montrer un tout autre visage pour espérer faire partie des 32 sélections qui participeront à la prochaine Coupe du Monde. Néanmoins, les doutes persistent chez les observateurs concernant les compétences du sélectionneur, à l’image du #FernandoSantosOut, qui devient de plus en plus viral sur les réseaux sociaux. Avec ou sans ce dernier, il y a un réel travail à effectuer.

Cristiano Ronaldo, Bernardo Silva, Bruno Fernandes, Diogo Jota, André Silva, João Félix, Rafael Leão, etc… Beaucoup de noms pour peu de places. L’animation offensive portugaise est probablement le secteur le plus fourni dont dispose O EngenheiroPourtant, il semble difficile pour ce dernier de trouver la meilleure solution.

Si CR7 est indéboulonnable dans le XI, Bernardo Silva est lui préféré sur l’aile droite, poste auquel ses capacités ne semblent pas être exploitées au maximum. En effet, le joueur de Manchester City réalise un début de saison remarquable en plein cœur du jeu des hommes de Pep Guardiola. Il est l’une des pièces majeures du technicien espagnol, dans un rôle d’électron libre au milieu de terrain qui lui correspond à merveille. Dans l’un des clubs rivaux, Manchester United, Bruno Fernandes est également une pièce maîtresse. En équipe nationale, son rôle est de plus en plus remis en question. Pour accompagner le mythique capitaine, André Silva et Diogo Jota ont été les deux joueurs qui ont eu le plus de temps de jeu. Trop peu satisfaisants dans le jeu, qui plus est, dans un rôle parfois trop excentrés, il a de nouveau été difficile pour eux de faire valoir leurs capacités. 

João Félix, Rafael Leão, Gonçalo Guedes ou encore Rafa Silva ont pour le moment une étiquette de remplaçants, sans pour autant avoir pu exprimer leurs qualités. S’ajoute à cette liste le blessé de longue durée, Pedro Neto, qui avait forte impression lors de son dernier match avec le Portugal.

Au milieu de terrain, le style de jeu atypique de Renato Sanches permet d’offrir davantage de solutions pour déstabiliser le bloc adverse. Arrivé récemment en sélection, Matheus Nunes a quant à lui vécu un rassemblement difficile. Après son match raté face à l’Irlande, il s’est retrouvé écarté du groupe pour le choc contre la Serbie. Le vétéran, João Moutinho, capable d’apporter sa sérénité et son expérience au sein de ce jeune effectif, fait lui aussi partie des options. João Mario, forfait lors de ce rassemblement, aura son mot à dire, surtout au regard des prestations de ses principaux concurrents.

Derrière eux, João Palhinha et Danilo Pereira sont en concurrence pour la place de titulaire en tant que 6 dans l’équipe. Pour autant, le retour intéressant de William Carvalho du côté du Bétis pourrait faire basculer la balance, surtout lorsque l’on connaît l’importance que ce dernier a pu avoir par le passé en Seleção. En clair, la concurrence est présente et d’autres joueurs sont également susceptibles de venir perturber les choix du sélectionneur. Pourtant, comme nous l’avons tous très bien vu ce dimanche soir, notre milieu de terrain n’a pas su répondre aux offensives serbes. De quoi mettre en avant la nécessité de trouver, enfin, la bonne combinaison.

Du côté de la défense, le débat se situe plutôt sur le poste de latéral gauche. Raphaël Guerreiro et Nuno Mendes sont en concurrence. Le premier, installé depuis plusieurs années à ce poste, a pendant très longtemps été la solution première sans réelle concurrence hormis Mario Rui, rapidement replacé en second plan. Quant au deuxième, après une superbe saison avec le Sporting, ses débuts du côté du PSG sont contrastés. Trop de pression ou encore mal utilisé, telles pourraient en être les explications. Le jeune latéral de 19 ans possède devant lui de longues années pour développer tout son potentiel. Ce duel risque dans tous les cas d’être intéressant. À droite, João Cancelo est loin devant dans la hiérarchie, tout comme Pepe et Rúben Dias dans l’axe. 

En bref, le chantier de la sélection est global. La concurrence dont fait face le Portugal n’a pour le moment pas apporté la solution miracle. L’effectif est de qualité mais le jeu beaucoup moins. Alors, quels choix privilégiés ?

Vers un nouveau schéma de jeu ?

La remise en question de la formation dans laquelle la sélection lusitanienne évolue émerge de plus en plus chez les supporters. Une volonté de changer de système se développe. Parmi les différentes options, deux d’entre elles semblent avoir les faveurs de la majorité : le 5-2-1-2 et le 4-4-2 avec un milieu en losange. Un début de réponse au problème posé ?

 Un système à cinq défenseurs pour profiter pleinement de la qualité des latéraux ?

Original, mais pas seulement, cette formation basée sur une défense à cinq pourrait bien être utile. Au-delà de l’effet de mode dont elle a la réputation, des entraîneurs comme Thomas Tuchel, vainqueur de la dernière Ligue des Champions, Antonio Conte, nouvel entraîneur de Tottenham, ou Rúben Amorim au Sporting, ont su en faire une véritable arme.

En dehors d’une solidité défensive apportée par les trois centraux, le rôle des pistons est d’autant plus important pour apporter le surnombre en phase offensive. João Cancelo, Nuno Mendes ou Raphaël Guerreiro, habitués à dézoner et à faire parler leurs palettes techniques, seraient ainsi utilisés de sorte à ce qu’ils puissent exploiter au maximum leurs qualités individuelles. Ils pourraient alors plus facilement combiner avec les milieux de terrain pour offrir davantage de solutions.

Les solides Pepe et Rúben Dias devront être accompagnés par un autre central, comme José Fonte. Les capitaines du LOSC et du FC Porto, qui approchent de la fin de leur carrière pourraient néanmoins voir une nouvelle génération pour les suppléer. Pas encore apparus en Seleção, Tiago Djaló et Gonçalo Inácio pourraient éventuellement compléter cette dernière ligne. Ainsi, le Portugal répondrait à ses problématiques défensives qui se trouvent majoritairement dans son dos.

Au milieu, João Palhinha retrouverait le même rôle que celui qu’il occupe en club. Bernardo Silva et Renato Sanches, celui-ci dans un rôle plus reculé, seraient davantage libres sur le terrain, là aussi, à l’image de leur jeu en club. Tout cela mènerait à placer sur le banc Bruno Fernandes qui, comme précisé précédemment, est assez décevant en sélection. Une autre solution consisterait à placer le joueur de Manchester City plus bas sur le terrain, pour inclure Bruno Fernandes un peu plus haut sur la pelouse, aux dépends du milieu Lillois.

Devant, Cristiano Ronaldo serait accompagné d’un attaquant qui, selon l’adversaire pourrait être amené à changer régulièrement. Par exemple, dans la quête d’un joueur créatif, João Félix serait préféré pour ses qualités techniques et sa vision du jeu, il pourrait également être amené à décrocher de telle sorte à se retrouver sur la même ligne que Bruno Fernandes ou Bernardo Silva pour densifier le milieu de terrain et être au cœur de la construction du jeu. André Silva et Diogo Jota sont quant à eux des attaquants de surface. Si cela semble plus évident pour le premier, le second, au regard de ses prestations du côté de Liverpool, semble avoir acquis une science du positionnement très intéressante, lui permettant d’être à la réception de nombreux centres et ainsi faire parler son sens du but. De la variété, et du choix.

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Le 4-4-2 losange pour maitriser la bataille du milieu de terrain

Le 4-4-2 losange offre divers avantages basés sur la qualité de l’effectif. Tout d’abord, à l’image du 3-5-2 évoqué plus haut, il offre une certaine liberté offensive aux deux latéraux João Cancelo et Raphael Guerreiro/Nuno Mendes, habitués à se projeter vers l’avant. Au-delà de ça, le losange du milieu de terrain favoriserait la maitrise du ballon, avec la tour de contrôle João Palhinha en soutien constant des deux infatigables relayeurs Renato Sanches et Bernardo Silva.

Un peu plus haut, Bruno Fernandes pourrait se retrouver dans une position bien plus libre, laissant parler toute la créativité qu’il met en avant sous le maillot des Red Devils depuis son arrivée en Angleterre il y a bientôt deux ans. Pièce centrale du système offensive, l’ancien capitaine du Sporting pourrait enfin prendre le jeu de la Seleção en main, en se baladant à la recherche d’espace, notamment dans la largeur, pour pouvoir être à l’origine des dernières passes.

Devant, comme pour le système précédent, l’indéboulonnable Cristiano Ronaldo profiterait de la variété des profils capables de s’associer à son jeu. Particulièrement à l’aise dans le rôle du second attaquant, João Félix agirait comme un électron libre autour du Mancunien, tandis qu’à d’autres moments, le sélectionneur portugais aurait tout le luxe de privilégier la présence devant le but d’un André Silva, ou le jeu de profondeur de Diogo Jota.

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Fernando Santos ou un autre ?

Similaires sur certains points, ces deux schémas particulièrement réclamés par les supporters de la Seleção semblent offrir au sélectionneur la possibilité de mettre en avant les qualités de ses meilleurs éléments. Mais au-delà du système choisi, c’est surtout l’animation mise en place par l’entraîneur et la maitrise tactique de l’équipe qui lui permettra de déployer son meilleur football.

Maintenu par la Fédération Portugaise de Football malgré cette nouvelle désillusion, Fernando Santos devra impérativement remettre en question ses méthodes, ses choix et ses convictions pour répondre de nouveau aux exigences du peuple portugais, particulièrement élevées, en raison du talent que l’Ingénieur a à sa disposition. A lui de rectifier le tir dès la phase de barrages, s’il en est encore capable.

Crédit photo : IconSport

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