Arrivé en cours de saison pour prendre les rênes du FC Aubagne en National, le technicien portugais nous a accordé un moment pour évoquer ses premiers pas comme entraîneur principal, son parcours et son regard sur le football portugais.
T : Vous avez un parcours unique, ayant travaillé en France et au Portugal aux côtés de l’entraîneur Rui Almeida. Qu’avez-vous retenu de cette collaboration ?
GS : Travailler avec Rui Almeida a été très enrichissant. J’ai commencé en France sans parler la langue, ce qui a rendu la première année au Red Star particulièrement difficile. Ensuite, nous avons enchaîné les expériences à Troyes, Caen, Niort, Bastia, puis au Portugal avec Gil Vicente. Nous avons toujours entretenu une très bonne relation. Rui Almeida, comme moi aujourd’hui, a été entraîneur adjoint, lui-même a appris aux côtés du professeur Jesualdo Ferreira, un technicien d’envergure passé par Braga, le Sporting, le FC Porto (avec trois titres de champion) et le Panathinaikos. Durant ces sept saisons ensemble, j’ai énormément appris, tant sur le plan tactique qu’humain.
T : Vous avez déjà accumulé une belle expérience sur le banc à 41 ans. Quel joueur vous a le plus impressionné à l’entraînement et en match ?
GS : J’ai côtoyé beaucoup de joueurs talentueux, mais celui qui m’a le plus marqué, c’est Allan Saint-Maximin, à Bastia. Il n’avait que 18 ans, mais il était déjà incroyable : vitesse, puissance, percussion… Il faisait des différences à chaque match. C’est en grande partie grâce à lui que Bastia s’est maintenu cette saison-là. Même si sa carrière à Nice puis à Newcastle est déjà très belle, je pensais sincèrement qu’il atteindrait le niveau de Mbappé. Aujourd’hui, il évolue en Turquie dans un championnat compétitif, mais avec d’autres choix, il aurait pu viser encore plus haut.
T : Vous avez travaillé en France et au Portugal. Quelles différences constatez-vous entre les deux pays, en termes de joueurs, de jeu et d’infrastructures ?
GS : Les profils de joueurs sont très différents. Au Portugal, les clubs recrutent souvent en Amérique du Sud : des joueurs très techniques. En France, on favorise des profils physiques et explosifs, souvent issus d’Afrique. Le jeu aussi diffère : plus lent, plus tactique au Portugal ; plus rapide et physique en France.
Côté infrastructures, le Portugal s’améliore beaucoup. Quand j’étais à Portimonense en début de saison, les conditions de travail étaient excellentes : deux terrains, une salle de musculation, hébergements… Mais en France, les installations restent supérieures, grâce notamment à un meilleur financement. À titre d’exemple, en Ligue 2 française, la plupart des clubs ont plusieurs terrains d’entraînement. À l’inverse, certains clubs portugais de première division, comme Estrela Amadora, n’ont même pas leur propre centre d’entraînement et doivent en louer un.
T : Vous avez rejoint le FC Aubagne en cours de saison pour votre première expérience comme entraîneur principal. Comment avez-vous vécu cette prise de fonction ? Étiez-vous satisfait du niveau de l’équipe ?
GS : C’est effectivement ma première expérience comme numéro un. Après avoir obtenu mon diplôme UEFA Pro l’été dernier, j’ai cherché un projet qui me corresponde. Le FC Aubagne m’a offert cette opportunité. Le club recherchait un entraîneur connaissant bien le football français, mais aussi capable d’apporter une nouvelle dynamique. Je pense avoir répondu aux attentes. J’ai trouvé un effectif de qualité, bien construit par le président et le directeur général. Mon parcours entre la France et le Portugal m’a clairement aidé à bien m’intégrer.
T : Le club a obtenu son maintien en National. Quel a été votre ressenti après cette réussite ?
GS : Nous avons assuré le maintien à deux journées de la fin, ce qui était l’objectif. Ensuite, nous espérions finir à la quatrième place, mais nous avons terminé sixièmes. C’est tout de même une belle performance pour le club, les joueurs et le staff.
T : Le marché portugais vous intéresse-t-il pour le recrutement d’un club de National ?
Concernant le mercato, le marché portugais est forcément intéressant, mais il faut tenir compte de l’adaptation : langue, style de jeu, intensité… Les joueurs locaux sont souvent mieux préparés pour la National. Mais je ne ferme aucune porte. Il y a de vrais talents au Portugal qui peuvent réussir ici s’ils sont bien accompagnés.
T : Récemment, Tozé Marreco (Farense) a critiqué un commentateur qui qualifiait son équipe de « punching-ball ». Est-ce que les journalistes devraient, selon vous, faire preuve de plus de respect envers les petits clubs ?
GS : C’est une question délicate. Je ne pense pas que les journalistes soient irrespectueux volontairement. Parfois, les propos sont mal formulés ou mal interprétés. Il est vrai que l’attention médiatique se concentre surtout sur les grands clubs, car ce sont eux qui attirent le plus de public. Mais il serait bien que la presse accorde plus de visibilité aux petites structures, qui font souvent un travail formidable. Dans l’ensemble, je ne ressens pas de condescendance, mais un rééquilibrage serait bénéfique.
T : Le Portugal est actuellement sixième au classement UEFA, menacé par la Belgique. Que faudrait-il améliorer pour rester compétitif ? Est-ce une question de qualité ou de moyens ?
GS : C’est surtout un problème de moyens. Les trois grands clubs (Porto, Benfica, Sporting) font généralement de bons parcours européens, mais derrière, l’écart est immense. Mis à part Braga, les autres clubs manquent de régularité.
Les salaires parlent d’eux-mêmes : certains clubs de National en France paient mieux que des équipes de Liga portugaise. En Ligue 1, les plus bas salaires tournent autour de 40 000 € mensuels, alors qu’au Portugal, beaucoup de joueurs touchent 6 000 ou 7 000 €. Malgré ces écarts, les clubs portugais continuent d’être compétitifs grâce à leur mentalité, à leur formation, à leurs entraîneurs… mais cela reste un exploit constant. Pour passer un cap, il faudra un vrai effort structurel et financier.

Grand amateur de football en général mais surtout de football portugais, Alexis a été baigné dans cette ferveur lusitanienne tout au long de sa jeunesse, entre rires, joie et tristesse. Attiré par le beau jeu et les nouveaux talents, il observe attentivement les différents championnats nationaux : de la Liga Bwin à la III Liga.
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