SC Portimonense : Le Japon au cœur de la stratégie économique et sportive

Depuis 2016, la stratégie économique et sportive de Portimonense passe, en grande partie, par un rapprochement avec le football japonais. Retour sur une collaboration qui porte ses fruits.

Bien qu’en difficulté sur le plan sportif cette saison avec une dangereuse 17ème place au classement, le Portimonense SC évolue très bien depuis la saison 2016-2017, et sa montée dans l’élite portugaise. Historiquement habitué à faire l’ascenseur entre les deux premières divisions du Portugal, le club et ses dirigeants ont mis en place, depuis 2016, une stratégie claire misant sur de bonnes relations avec le football japonais. Cette stratégie s’avère jusqu’ici payante tant au niveau sportif – le club a été sacré champion de D2 en 2017 avant de terminer la saison suivante à une honorable 10ème place en Liga NOS – qu’au niveau économique, avec de nombreuses réussites financières.

Mais comment ce club basé au sud du Portugal a-t-il créé cette relation avec les figures dirigeantes du football japonais, et comment cette coopération a-t-elle permis au Portimonense d’obtenir de si bons résultats sur tous les plans ?

Un trio déterminant

Le succès, bien que relatif, du Portimonense Sporting Clube découle, en partie, de la coopération entre trois hommes. Au cœur de cette coopération existe une très bonne entente entre les dirigeants du Portimonense SC et le vice-président de la fédération japonaise de football, Takeshi Okada. Cet ancien joueur professionnel et ancien sélectionneur du Japon a, à partir du début des années 2010, commencé à investir dans le club d’Algarve jusqu’à en devenir l’un des actionnaires majoritaires en 2016, avec Theodoro Fonseca. Figure japonaise importante, il a aidé le club aussi bien sur le plan sportif (grâce au réseau qu’il s’est constitué au Japon) que sur le plan économique, en incitant certains sponsors à s’intéresser de plus près au club promu en 2017.  Il a alors créé de bonnes relations avec les deux hommes à la tête du club. D’une part, Rodiney Sampaio, directeur du club et de la SAD, et d’autre part, Robson Ponte, directeur technique du club et ancien meneur de jeu de l’Urawa Reds … au Japon. L’entente entre ces trois hommes est, inévitablement, le facteur principal des différents succès récents du club.

La réussite sportive du projet

Et le succès est, avant tout, sportif. En 2016, Portimonense est parvenu à réintégrer l’élite du football portugais après avoir stagné durant six saisons en deuxième division. Bien que cette réussite soit à relativiser, du fait que le club ait déjà réussi à monter en première division par le passé, ce nouveau cycle au sein de la Liga NOS est plus pérenne et vise la stabilité. Le club évolue désormais en première division depuis trois saisons, ce qui n’était plus arrivé depuis la fin des années 1980. Au cœur de ce projet figure une majorité de joueurs lusophones, bien sûr, mais aussi des Japonais, ce qui peut paraître, à première vue, assez inhabituel.

Mais tout cela a une explication. En 2016, un accord a été mis en place entre le club et certaines instances du football japonais. Les termes de celui-ci sont simples : Portimonense doit envoyer, en priorité, certains de ses joueurs hispanophones et lusophones plus expérimentés en prêt du côté de l’achipel nippon, tandis que certaines grandes promesses du football japonais seront, en échange, envoyées au club basé à Portimão. Cet accord fait alors du club portugais une réelle porte d’entrée européenne aux footballeurs japonais, rêvant d’évoluer dans les plus grands clubs du monde. A peine quelques semaines après la signature de cet accord, trois joueurs japonais faisaient un essai au club, à savoir So Kataoka, Masahito Onoda et Kodai Nagashima. Bien que ces essais ne furent pas tous fructueux, ils ont eu pour effet d’encourager de nombreux joueurs originaires de l’archipel à tenter l’aventure à l’autre bout du monde.

En contrepartie, certains joueurs du Portimonense ont effectué le voyage inverse. En juillet 2016, le brésilien Fabricio est prêté aux Kashima Antlers, tandis qu’en 2017 son compatriote Renatinho, est envoyé au club japonais de Vonds Ichihara.

En figure de proue du bien fondé de cet accord, un ailier performant et travailleur : Shoya Nakajima. Le Japonais, arrivé à Portimonense en provenance du FC Tokyo en 2017 s’est rapidement démarqué et illustré comme le meilleur joueur de l’effectif du PSC, marquant au total 17 buts, tout en délivrant 19 passes décisives en 53 matches joués durant à peine 18 mois. Il a alors suscité l’intérêt de plusieurs grands clubs européens comme Benfica, Porto ou le PSG, et s’est vu octroyé le statut d’exemple à suivre pour tous les jeunes joueurs japonais rêvant de jouer en Europe.

En 2019, deux nouveaux joueurs ont rejoint le club portugais. D’abord, le gardien international japonais Shuichi Gonda, qui est devenu titulaire en février dernier, puis le latéral droit Koki Anzai, qui a parfaitement rempli sa mission de remplacer Manafa, parti à Porto six mois plus tôt, et qui s’est imposé comme un titulaire dans le onze de Portimonense.

Un bilan économique encourageant pour l’avenir

Dans le football moderne, l’aspect sportif ne représente plus que la partie émergée de l’iceberg. Facteur de plus en plus important et désormais central de ce sport, l’aspect économique est déterminant pour tout club aspirant à évoluer de façon significative. Sur ce point, aussi bien que sur l’aspect évoqué précédemment, le Portimonense SC s’en sort plutôt bien.

Pour le club, la transaction phare de ces dernières années reste, sans conteste, la vente du prodige japonais Shoya Nakajima, vendu en février 2019 au Al-Duhail SC pour une somme record de 35 millions d’euros. Nakajima est ainsi devenu, de loin, la vente la plus importante de l’histoire du Portimonense, mais aussi le joueur asiatique le plus cher de l’histoire devant Heung-Min Son, acheté par Tottenham pour 30 millions d’euros en 2015. Cette vente exceptionnelle a permis aux dirigeants de faire, à la fois, un très bonne opération financière, mais également de créer un engouement autour de ce transfert, suivi aussi bien en Europe qu’en Asie, et offrant au club une promotion inédite. En y additionnant les ventes de Fabricio, Paulinho ou encore d’Ewerton, le club a pu se venter d’afficher un total de ventes d’environ 45 millions d’euros sur la saison 2018-2019.

Les bénéfices de ces ventes ont, en grande partie, été réinvesti dans la formation, sur laquelle le club mise beaucoup. Il dispose également d’une bonne entente avec le centre de formation de Benfica, qui bénéficie d’une base dans la ville de Portimão, pouvant favoriser des transferts de jeunes espoirs. Le club a également pu investir dans l’arrivée de nouveaux joueurs plus talentueux, à l’image de Jackson Martinez, star du championnat depuis son passage à Porto. Bien qu’arrivé libre en provenance du championnat chinois, le club d’Algarve a pris en charge son salaire qui est l’un des plus important de l’effectif. Les dirigeants ont également misé sur des joueurs sur lesquels une plus-value était plus facilement envisageable, à l’image de Lucas Fernandes, arrivé en provenance du São Paulo FC cet été pour 2,2 millions d’euros et dont le prix avoisinerait d’ores et déjà les 10 millions d’euros. D’autres jeunes brésiliens de l’effectif comme Tabata ou Henrique pourraient également voir leur valeur croître rapidement d’ici quelques saisons.

Les sponsors jouissent également d’un rôle prépondérant dans la vie économique d’un club. Et là encore, les Japonais sont extrêmement présents à Portimão. Mizuno, équipementier officiel et l’un des trois sponsors majoritaires du club est une entreprise japonaise très célèbre dans la péninsule asiatique. Elle a notamment eu de nombreuses stars en tant qu’égéries, aussi bien dans le championnat portugais avec Pablo Aimar, Jonas et Hulk que dans le football japonais avec, entre autres, Yuki Abe, Keisuke Honda ou encore Shinji Okazaki. Le sponsor majoritaire du club est également une entreprise japonaise du nom de Ceremony. Ces différents soutiens venus d’Asie aident grandement le club, et sont permis grâce à l’image et aux relations que possède désormais le Portimonense SC au pays du soleil-levant. En décembre 2018, les dirigeants du club avaient même reçu l’ambassadeur japonais au Portugal dans leurs locaux.

Et à l’avenir ?

L’avenir du club semble désormais contrasté. Sur le plan financier, tous les voyants sont au vert. Des pourparlers avec la mairie de Portimão auraient même débutés pour l’acquisition d’une enceinte sportive. Mais sur le plan sportif, les résultats de l’équipe sont loin d’être à la hauteur des attentes malgré la bonne saison de quelques individualités. Bien que le club s’en soit très bien sorti lors des deux dernières saisons, la saison 2019-2020 est plus compliquée, et le club pointe actuellement à une bien triste 17ème place. Tout se jouera donc lors des dernières journées, et les joueurs devront tout faire pour échapper à une relégation qui marquerait un frein de taille aux ambitions du club. Les Japonais Gonda et Anzai auront un rôle important à jouer dans cette fin de saison, et auront à cœur de maintenir le club dans l’élite afin de continuer à promouvoir l’image du football nippon dans la péninsule ibérique.

Crédit photo : IconSport

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